S’ouvrir à la joie pendant la période des Fêtes

Pendant le temps des Fêtes, nous sommes entourés de messages nous rappelant de ressentir de la joie, de la connexion et du bonheur. Beaucoup d’entre nous attendent avec impatience ces émotions positives ou s’attendent même à les ressentir. En tant que psychothérapeute qui travaille beaucoup avec des personnes ayant survécu à un traumatisme – et ayant moi-même survécu à un traumatisme – je comprends à quel point cette saison peut être difficile. Il y a souvent un décalage entre ce que nous pensons devoir ressentir et ce que nous vivons réellement. Explorons les raisons de ce décalage et découvrons des moyens de nous ouvrir à des moments de joie authentiques pendant le temps des Fêtes.

Pourquoi la joie semble insaisissable

Beaucoup d’entre nous ne réalisent pas que nos émotions se manifestent d’abord sous forme de sensations physiques, avant que notre cerveau ne leur attribue une signification quelques millisecondes plus tard. En voici un exemple :

Sally, une vétérane des Forces armées canadiennes (FAC) qui est atteinte d’une blessure de stress opérationnel (BSO), se réjouit chaque année de se retrouver en famille pour le repas de Noël. Pourtant, lorsqu’elle arrive à la porte, elle remarque que son rythme cardiaque s’accélère. Au lieu d’y voir de l’excitation, son cerveau interprète ces sensations accrues comme un signe de danger possible, ce qui déclenche chez elle de l’anxiété et de l’effroi. Cette interprétation erronée conduit Sally à se sentir anxieuse au lieu d’être capable de ressentir la joie du moment.

Le cerveau de Sally est très sensible à la perception des choses comme étant menaçantes. Pour les personnes exposées à un traumatisme, les sensations physiques telles que l’accélération du rythme cardiaque – même lorsqu’elle est liée à quelque chose qui nous enthousiasme – peuvent être interprétées par le cerveau comme étant intenses, voire accablantes. Cela peut transformer ce qui pourrait être une expérience joyeuse en quelque chose de trop intense, voire d’effrayant.

La joie peut également être difficile à ressentir si vous avez du mal à gérer divers déclencheurs de traumatismes ou des habitudes d’adaptation potentiellement nuisibles pendant le temps des Fêtes. Certains membres de la famille, certains lieux et même certaines odeurs peuvent susciter des réactions émotionnelles difficiles, susceptibles d’affaiblir notre moral.

La vulnérabilité dans la joie

La joie est une émotion fascinante. La chercheuse Brené Brown la décrit comme notre émotion la plus vulnérable. Souvent, lorsque nous ressentons de la joie, celle-ci peut sembler trop belle pour être vraie, ce qui peut nous amener à anticiper les difficultés pour nous protéger de la déception. Cette « joie anticipée » peut nous empêcher de profiter pleinement des moments de joie et nous empêcher de les savourer vraiment.

Je pense que, parce que les premiers intervenants et les soldats apprennent des compétences telles que le courage sous le feu et la bravoure, les sentiments vulnérables tels que la joie peuvent parfois devenir de plus en plus difficiles à éprouver au fil du temps, en particulier pour ceux qui ont connu des difficultés ou des traumatismes liés à leur travail. Parfois, le type de résilience et de force mentale requis dans ces professions doit être désappris dans les contextes où il ne vous sert pas.

Pratiquer la conscience incarnée de la joie à l’aide de lueurs

Je veux vous rappeler que non seulement vous méritez d’éprouver de la joie si vous le souhaitez pendant les Fêtes, mais que c’est possible même si cela a été difficile dans le passé.

Pour éprouver véritablement de la joie, nous pouvons nous entraîner à savourer de minuscules et fugaces instants de bonheur – connus dans les cercles de thérapie traumatique sous le nom de « lueurs » – qui nous aident à ressentir des moments de joie tout en restant ancrés et présents. Pour ce faire, nous pouvons être présents et conscients de notre corps et de nos sensations. Voici quelques façons de s’entraîner à la prise de conscience corporelle des expériences joyeuses, afin de faciliter l’accueil de la joie pendant le temps des Fêtes :

• Remarquer les lueurs de chaleur et de confort : Prêtez attention à la chaleur d’une couverture douillette, à la douce lueur des lumières ou à la douceur d’une friandise. Permettez-vous de rester dans ces moments sans vous précipiter.
• S’ancrer avec des lueurs de gratitude : Cultivez des moments naturels de gratitude pour des plaisirs simples, comme le son du rire d’un être cher ou le charme d’un bonhomme de neige imparfait mais mignon. Remarquez ce que vous ressentez physiquement dans votre corps. Vous remarquerez peut-être une certaine chaleur ou sentirez votre poitrine se gonfler. De tels petits gestes d’appréciation nous aident à nous enraciner plus profondément dans des moments simples et joyeux qui nous semblent stables et durables.
• S’ancrer dans des lueurs spirituelles ou interpersonnelles : La joie émerge naturellement de manière significative lorsque nous remarquons des moments petits mais spéciaux avec d’autres personnes. Une discussion rapide avec un être cher, un moment de réflexion sur ce qui compte le plus ou un sourire chaleureux partagé avec un étranger – lorsque nous y sommes attentifs, ces moments peuvent être des lueurs de connexion qui apportent de la joie. La philosophe Iris Murdoch appelle cela le « désintéressement », où de petits actes – offrir un coup de main, partager une tradition des Fêtes ou donner en retour d’une manière simple – nous permettent de sentir que nous faisons partie de quelque chose de plus grand. Ces petits mais puissants moments de connexion spirituelle ou interpersonnelle peuvent nous ancrer dans la joie et créer un sens durable.

En nous ouvrant à de petits moments incarnés et en partageant l’esprit de connexion, nous pouvons puiser dans la joie, même au cours d’une saison qui pourrait autrement nous sembler difficile. J’espère que cela vous aidera à accueillir des lueurs de joie significatives pendant le temps des Fêtes!

— Adrienne Carfagnini, MSW, RSW
Thérapeute du sexe, des relations et des traumatismes